Origine
historique de la représentation de la Nativité de Jésus
Christ : La Crèche
Évolution de ses représentations
Représentations iconographiques : fresques des catacombes
romaines (1)
Sculptures sur certains sarcophages au IV° siècle (2), sur les
châteaux romans XII° siècle et des jubés gothiques (3).
Des lointaines mosaïques et des icônes bizantines de même que de
très nombreuses peintures ont au cours des siècles illustré la
Nativité, l’Adoration des bergers, l’Adoration des Mages.
Une crèche, sous le pape Théodore, au VII° siècle, aurait été
déposée en l’église Santa Maria Transtevere, à Rome.
Saint François d’Assise, qui, en 1223 à Greccio, la nuit de
Noël, a créé la crèche vivante « L’on porta du foin et l’on y
mena le bœuf et l’âne » (Thomas de Celano), le « petit enfant de
Bethléem » étant représenté, dit-on, par une figurine ; cette
représentation a été à l’origine d’un nouvel élan de ferveur
envers ce merveilleux mystère.
Parallèlement, les « mystères religieux », des chants de Noël
étaient interprétés dans les églises (4). Par la suite, à
l’extérieur à cause de certaines dérives en ce qui concerne les
« mystères ».
Après le XIII° siècle, des Sainte Famille sont exposées dans
les églises, Saint Joseph étant représenté un peu
ultérieurement, puis les Mages (5) et (6)
Au XVI° siècle, après le Concile de Trente, des crèches
comprenant les personnages traditionnels sont exposées. Oeuvres
sculptées dans le bois, dorées et polychromes, telles celle de
Chaource (7). Le style baroque leur confère son propre style
(8).

Chaource - L'adoration des Mages
Au XVIII° siècle s’établit progressivement un art de la crèche
utilisant le verre filé (9), toujours le bois doré polychrome
(10), la « mie de pain », le carton-pâte.
Durant cette période se développent à Naples des représentations
très spectaculaires de crèches avec de très nombreuses figurines
en bois et étoupe revêtues de costumes somptueux. Ces crèches
monumentales très ouvragées, remarquables par la minutie dans
les détails, répartissent sur plusieurs niveaux les personnages
qui convergent vers la Sainte Famille très souvent logée dans
les ruines d’un Temple antique (11).
Au XIX° siècle poursuit dans l’utilisation de ces divers
matériaux, dont la cire et le carton pâte (12), le liège (13).
Le santon (14) d’argile crue, santon populaire, voit le jour à
Marseille. Jean-Baptiste Lagnel, connu aussi sous le nom d’Agnel
(1764-1827) se met à façonner de petites statuettes d’argile. Il
a eu l’idée d’en faire des moulages qui reproduisent plusieurs
séries de personnages identiques. C’est ce qui le fait
considérer comme le véritable père du santon actuel.
Ce santon d’argile connut un succès immédiat en permettant aux
familles de réaliser leur propre crèche à un prix modique.
La crèche familiale a vu le jour à la suite de la Révolution
Française, période durant laquelle la majorité des églises
avaient été fermées. Les familles aisées possédaient soit un
« repas de Jésus » en cire, sous globe, soit une « crèche
vitrine ».
Durant cette période, mais hors Révolution, le public pouvait
assister à des « crèches parlantes », constituées de santons de
grande taille en bois vêtus de costumes traditionnels et
articulés (15).
Les pastorales, dont l’origine remonte aux anciens mystères,
mettent en scène et en langue dialectale la Nativité. La sainte
Famille est honorée par tout le petit peuple provençal, le même
qui est représenté par les personnages de la crèche qui
interviennent dans les Noëls (« Nouvé ») et les pastorales.

Chaource - L'adoration des bergers
Les santons provençaux.
Jésus – l’Enfantoun
– fut longtemps modelé dans la cire, celle des cierges d’église,
comme pour mettre une distance entre cet Etre d’essence divine
et le reste des personnages. Il en a été de même pour l’ange
Boufereu. Il est généralement représenté les bras tendus vers
les adorateurs, vêtu de blanc.
L’ange « Boufareu » -
Personnage intemporel, qui a pour mission d’annoncer la
naissance du Messie aux bergers (cf les bergers). Souvent il
souffle (boufà) dans une trompette d’or. Vêtu de blanc, de bleu
ciel ou de rose.
Marie – Maria – elle a
un rôle à la fois humain et divin, mère céleste de tous les
hommes. Agenouillée devant son Fils. Vêtue de d’une robe bleue
et d’un voile blanc.
Joseph
– Jousé – père nourricier de Jésus,
époux de Marie. Vêtu de marron et de violet. Il tient un bâton
(parfois fleuri d’un lis) à la main.
Ces quatre personnes portent les vêtements de la tradition
biblique.
Le
bœuf et l’âne gris – lou biou e l’ase
- très répandus en Provence, ils trouvent naturellement leur
place dans l’étable où ils rejoignent l’âne et le bœuf de la
bible. Tous deux réchauffent l’Enfant de leur souffle.
Ils font accomplir la prédiction d’Isaie « Tu seras dans un
milieu d’animaux ».
Les
bergers – li pastre – Ce sont les
personnages clefs du « chez nous d’autrefois ».
C’est aux plus humbles, les bergers, que l’ange du Seigneur
apparut. Ils portent en eux tout le mystère de Noël : ils en
sont illuminés. En eux sont réunis l’attention, le
recueillement, l’adoration et la joie ! Il y a plusieurs
représentations de bergers particulièrement significatives :
-
l’homme couché, endormi, avant l’appel de l’ange,
-
le berger figé, contemplant l’ange ,
-
les jeunes bergers musiciens jouant du fifre (ou de la cabrette,
de la cornemuse, du double pipeau)
-
le berger d’âge mûr, debout, la musette à l’épaule, l’agneau sur
les épaules, le chien à ses pieds.
Les Rois Mages (à
l’origine des devins et des astrologues et non des rois)
-
Gaspard (Galgalath), le plus jeune, imberbe, de race africaine,
vêtu de bleu, apporte dans un ciboire l’encens réservé aux
dieux.
- Balthazar (Malgathat), de race sémite, portant une barbe noire
et d’âge mûr, vêtu de rouge, offre l’or réservé aux rois.
- Melchior (Sarathin), de race blanche, ayant une longue barbe
blanche,vêtu de vert, présente dans un coffret la myrrhe
réservée aux mortels.
Placés dans la crèche le jour de l’Epiphanie (la fête des
lumières à la lumière de Dieu),15 jours après la Noël. Guidés
par une étoile, ils viennent de contrées lointaines adorer
l’Enfant et lui offrir des présents : l’encens, l’or, la myrrhe.
Représentés sur des sarcophages, et dans certaines fresques des
catacombes romaines, parfois au nombre de deux et allant jusqu’à
six.
Ils occupent une place toute en symbolique : l’allégeance des
puissants, les trois races, les trois âges de la vie, les trois
continents alors connus.
La fileuse – la filouha
– elle file la laine pour revêtir l’Enfant.
Le ravi – l’esbaudi –
c’est l’innocent du village. Par son innocence, il est proche du
ciel.
le pêcheur – lou
pescadou – il est jeune et porte sur l’épaule un panier de
poissons.
les bohémiens – li
boumia – ils viennent se repentir des rapts d’enfants dont ils
sont accusés.
la poissonnière – la
peissounièro – c’est, des santons, le plus ancien connu.
la lavandière – la
bugadiero – qui vient laver les langes du Bambin
l’arlésienne – élégante
dans son beau costume de fête
l’aveugle et son fils –
il vient vénérer le Sauveur. Dans les pastorales, il recouvre
miraculeusement la vue.
Le meunier – lou
moulinié - personnage important dans la tradition provençale
car il a un rôle économique essentiel.
Le tambourinaire – lou
tambourinaire - santon ayant de la prestance dans son costume en
velours ; il anime les fêtes traditionnelles ainsi que les
danses provençales.
La femme au fagot –
la frema au gaveu - âgée, courbée sous le poids du plus humble
des présents, elle vient apporter à Jésus un peu de lumière et
de chaleur.
Les vieux – li viei -
Grasset e Misé Grassetto, Jordan e Misé Margarido, ils se
donnent le bras.
Le vannier – lou
banastouniè – il travaille à confectionner un berceau pour
Jésus.
La lavandière – la bugadiera – robuste, elle porte un
battoir à la main et de l’autre main une cuve pleine de linge.
Mireille – Mireio – l’héroïne de Mistral offre à
l’accouchée le bouillon de la poule noire.
Bien d’autres personnages encore se dirigent vers l’étable,
chacun avec son modeste présent. Les animaux de la vie de tous
les jours se mêlent au cortège : les moutons debout, couchés,
mangeant, les chèvres, le chien bergers, la basse-cour.
Les foires aux santons et certains marchés de Noël offrent aux
visiteurs, chaque année, un choix de très beaux santons réalisés
par les santonniers de talent fidèles à la tradition mais aussi
à la création de nouveaux personnages.
1) Sainte Priscilla – Domitille – Cimetière Saint Sébastien –
Rome.
2) dont Arles (13) Musée Lapidaire Chrétien – Saint Maximin
(83) : basilique.
3) dont Arles : Cloître St Trophine XII° s. – Autun : Cathédrale
St Lazare XII° siècle – Chartres : ancien jubé de la cathédrale
XIII° s.
4) cette tradition orale dont on a les premières traces dès
1170, (cour d’Angleterre). En Allemagne, Italie, Espagne,
Pologne, a acquis sa spécificité provençale par son ton enjoué –
Saboly 1660
5) Paris : cathédrale Notre Dame – adoration des Mages XIV° s.
– Chambéry : (Savoie) cathédrale – bois sculpté.
6) à Greccio, une Nativité sur métal (Sanctuaire Franciscain de
la crèche) – Châlons-sur-Marne : Musée municipal – adoration des
Rois Mages –sculpture en marbre fin.
7) Chaource (Aube) : église 1540 environ – Nogent-le-Ratrou
(Eure et Loir) : église Notre-Dame, 2nde moitié XVI° s. : crèche
en terre cuite polychromée.
8) Saint Maximin : crèche en bois sculpté et doré, fin XVII°.
9) Marseille (13) : Musée du Vieux Marseille – verre filé de
Nevers.
10) Musée du Vieux-Marseille , de Château-Gambert : créches en
liége de Garouste.
11) Musée du Vieux-Marseille : Adoration des Rois Mages – dite
aussi « Turquerie ».
12) Dauphin ( Alpes de Haute Provence) : Eglise – figurines en
carton pâte habillés.
13) Paris : Musée de Cluny. Monaco : musée national des
automates.
14) Santon : santoun en provençal : petit saint, à ne pas
confondre avec les « santibelli » italiens représentant les
saints et le clergé.
15) Avignon (84) : Notre-Dame-des-Dons – crèche réalisée par les
Carmélites – figurines en cire habillées – personnages du peuple
en costumes traditionnels provençaux.

Crèche Carbonel